LES RAISONS DE L’ÉCHEC DU RÉGIME DE MACKY SALL CONCERNANT LA GESTION DES DENIERS PUBLICS

Malgré un niveau d’endettement très élevé de 14.000 milliards et un budget record d’un montant de 7.000 milliards, le Président sortant, Macky Sall, n’a pas réussi pour autant à rationaliser nos ressources financières. Retour sur les raisons d’un tel échec…

Durant les douze années de son « règne », le président de la République sortant, Macky Sall, a été un mauvais élève en ce qui concerne une utilisation rationnelle de l’argent du contribuable sénégalais.

Ceci s’est traduit par un déficit de 800 milliards CFA sur le dernier budget. Pour combler ce gap, les nouvelles autorités ont fait recours sur le marché international à une émission d’eurobond d’un montant de 451 milliards. Cette nouvelle émission est la septième contractée par notre pays dont une sous le président Wade et six sous le magistère de son successeur Macky Sall. Elle vient ainsi gonfler le montant de l’endettement du Sénégal qui était de 14.000 milliards de francs CFA au moment du départ du prédécesseur du président Diomaye Faye. Malgré cet endettement record dépassant le seuil autorisé par l’UEMOA, notre pays est toujours confronté à un problème de liquidités. Ceci s’explique par une mauvaise orientation économique, des dépenses à outrance à caractère politicien, une floraison de détournements de deniers publics ou une mauvaise gestion de ces derniers, un niveau de corruption très élevé, des projets mal exécutés, une impunité réelle… du pouvoir sortant. Aujourd’hui, pour faire face à l’impératif de remettre nos finances publiques à niveau, il fallait très vite trouver une alternative, même la moins souhaitable, pour s’attaquer aux urgences. Toutefois, le chef de l’État et son gouvernement doivent bien utiliser les emprunts faits (notamment l’eurobond de 451 milliards et les 230 milliards attendus du Fmi au cours de ce mois de juillet) afin de se projeter vers la réalisation des grandes promesses que les populations attendent toujours. Des populations obligées de faire preuve d’un peu de patience le temps que la situation financière soit rétablie.

Les failles du PSE, la violation du code des marchés publics, des projets surfacturés ou mal gérés…

Dès l’arrivée au pouvoir du Président Macky Sall au pouvoir, il a filé droit en France pour négocier un appui budgétaire de 80 milliards de francs pour faire face à un besoin pressant d’argent puisque, disait-il, il avait trouvé les caisses vides. Deux ans après, le Yoonu Yokkuté, programme qui l’a porté au pouvoir, est remplacé par le PSE (Plan Sénégal Emergent) devenu le nouveau référentiel pour le développement économique et social de notre pays. Pour financer ce plan, le Sénégal a décroché auprès du Groupe Consultatif de Paris d’un montant de 3729 milliards de nos francs pour sa première phase. Une somme qui venait ainsi gonfler l’ardoise de la dette trouvée sur place qui était de 3.000 milliards de francs CFA. Mais, comme on dit, la dette n’est pas mauvaise en soi si on en fait bon usage. Autrement dit, lorsqu’elle est orientée vers des secteurs porteurs de croissance. C’est justement à ce niveau que le régime sortant a failli. Au lieu d’orienter la manne obtenue vers les secteurs stratégiques ayant un impact positif direct sur les populations à savoir l’agriculture, l’élevage et la pêche, aux fins de les booster, le pouvoir du président Macky Sall a choisi de privilégier la construction d’infrastructures. Il est vrai que c’est dans ce secteur qu’il est le plus facile de faire des surfacturations à milliards ni vu ni connu ! C’est ainsi que des centaines de milliards de francs ont été injectés dans la réalisation du Centre international de Conférences Abdou Diouf (CICAD), du stade Abdoulaye Wade, de la salle  Dakar Arena, du Parc des Expositions, du Marché& d’intérêt national, de la Gare des gros-porteurs, des sphères ministérielle de Diamniadio… Quant à la réfection du Building Administratif de  Dakar, d’un coût initial de 17 milliards de francs, la facture a atteint 42 milliards à l’arrivée. Moins d’un an après son inauguration en grande pompe, un incendie s’y déclenchait dû à des malfaçons. Selon les spécialistes, l’argent injecté dans cette réhabilitation aurait pu servir à construire trois buildings similaires ! Quant au TER (Train Express régional), il a coûté presque 1000 milliards de francs pour un linéaire de… 19 km, ce qui en fait l’infrastructure de ce type la plus coûteuse du monde ! Ne parlons pas du BRT (Bus Rapid Transit) qui aurait coûté 100 milliards de francs.

C’est donc dans cette dynamique peu appréciée que le Président Macky Sall s’est longtemps inscrit pour espérer mettre notre pays sur les rampes du développement. Ou, plutôt, de l’émergence ! Toutes ces entreprises coûteuses ont été confiées à des entreprises étrangères. Résumons : des projets surfacturés, des investissements lourds à croissance extravertie, des accords de partenariat qui profitent plus aux étrangers. Ah, on allait oublier l’autoroute Ila Touba qui a nécessité un investissement de 400 milliards de francs alors que le trafic automobile entre  Dakar et la capitale du mouridisme ne justifiait nullement la réalisation d’une infrastructure aussi coûteuse. Résultat : un déficit d’exploitation chronique. Dans la même veine, les bailleurs que sont la Banque Mondiale et le FMI ont dicté leurs lois quant aux secteurs où leurs fonds devraient être utilisés. C’est la raison pour laquelle le secteur primaire n’a pas eu la part part belle dans ces financements.

Priorité aux infrastructures pour s’en mettre plein les poches !

Ainsi la politique agricole mise en œuvre n’a jamais permis de réaliser l’autosuffisance alimentaire encore moins moderniser le secteur, l’élevage n’a pas pris son envol et la pêche est la chasse gardée des navires étrangers qui pillent nos mers grâce à des contrats dont les termes ne sont pas encore élucidés. Pourtant, ces trois secteurs réunis pouvaient à eux seuls régler une bonne partie du chômage, réduire le coût de la vie, réguler le flux de ruraux vers les zones urbaines et permettre de booster la croissance. Mais la démarche mise en œuvre par le régime de Macky Sall a été telle que les exonérations fiscales aux motivations nébuleuses accordées à des entreprises, la privatisation à outrance de notre industrie dont le secteur stratégique de l’eau (donnée au français Suez), ainsi que les lourdes charges de l’État n’ont fait qu’accentuer le mal qui a affecté la bonne santé de nos finances publiques. Aussi il est souvent arrivé que les marchés publics soient attribués en violation du code qui les régit, que des projets soient surfacturés et d’autres ne soient pas exécutés à hauteur des investissements annoncés. C’est le cas du Projet Décennal de Lutte contre les Inondations (700 milliards) et du PRODAC (29 milliards). Au finish, le régime du président Macky Sall s’est montré incapable d’assainir nos finances publiques, d’en assurer la transparence et la rationalisation.

De lourdes dépenses et des pratiques politiciennes…

Macky Sall qui avait prôné la gestion sobre et vertueuse à son accession au pouvoir, n’a pas attendu longtemps pour jeter à la poubelle ce slogan. Deux ans après son installation dans ses fonctions de président de la République, il avait eu un besoin pressant de disposer d’une majorité confortable à l’Assemblée nationale et d’une bonne représentation dans les collectivités territoriales. Ceci afin de pouvoir mener à bien sa politique économique et sociale gage d’un second mandat en 2019. Un objectif qu’il a très tôt mis au-dessus de tout, toutes ses réalisations, déclarations et activités étant subordonnées à la réalisation de cet objectif. Pour ce faire, le chef de l’APR (Alliance Pour la République) qu’il était a commencé par menacer de ses foudres les responsables de son parti et de sa coalition si toutefois ils ne gagnaient pas dans leurs localités. Cela voulait dire que la fin justifiait les moyens et que lesdits responsables pouvaient piller les ministères ou sociétés nationales qu’ils dirigeaient pourvu qu’ils offrent une victoire au président de la République ! Et ils ne s’en sont pas privés. Après les élections municipales de 2014, Macky Sall traduit en actes ses menaces en récompensant les vainqueurs par des nominations à des postes plus élevés et en sanctionnant les perdants qui ont été limogés de leurs fonctions. Après, il a changé d’approche pour se consacrer résolument à la politisation à outrance de l’Administration après avoir cautionné et encouragé le phénomène honteux la transhumance qu’il avait vertement critiquée auparavant ! Désormais, avec Macky Sall, tout état permis à ses hommes et femmes détenteurs de la carte du parti APR (Alliance Pour la République) ou membres de la coalition Benno Bokk Yaakar : les détournements de deniers publics, la mauvaise gestion, les recrutements à outrance pourvu qu’ils profitent aux militants du parti présidentiel, les financements orientés, les salaires alloués à des personnes payées à ne rien faire etc. Plus condamnable était l’impunité érigée en règle même pour des personnes épinglées par les corps de contrôle de l’Etat. Ces derniers avaient recommandé que certaines parmi ces personnes épinglées ne soient plus promues à des postes de direction du fait de leur gestion calamiteuse. Comme pour faire un pied de nez à ces corps de contrôle, Macky Sall a nommé ministres les personnes en question ! A cela s’ajoute la longue liste des personnes qui ont bénéficié des largesses du pouvoir pour s’enrichir à coups de milliards dans le dessein de participer au financement du parti. En même temps, on a assisté à une floraison d’institutions budgétivores servant au recasement de la clientèle politique du président.

Toutes ces pratiques ont contribué à donner un sacré coup aux finances publiques. Surpris par la situation catastrophique de ces finances, le nouveau régime n’avait d’autre choix que de se rabattre dans des conditions défavorables à l’eurobond pour se donner un peu de souffle, le temps de remettre le compteur des finances à un bon niveau. C’est compte tenu de cette situation catastrophique que les populations sont obligées de prendre leur mal en patience, le temps que les nouvelles autorités remettent de l’ordre dans les finances publiques. Ce qui risque de prendre du temps…

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